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Ecole municipale des beaux-arts Galerie Edouard-Manet de Gennevilliers
La Méthode graphique et autres lignes
Commissariat : Johana Carrier et Joana Neves pour la Plateforme Roven
25 novembre 2010-15 janvier 2011
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Exposition du jeudi 25 novembre 2010 au samedi 15 janvier 2011
Vernissage en présence des commissaires et des artistes + « Collection d’erreurs », perfor- mance de Davide Balula → mercredi 24 novembre [18:00—21:00]
Rencontre avec les commissaires et les artistes → samedi 27 novembre [14:30—16:00]
Helena Almeida
Silvia Bächli
Emanuele Becheri
Christoph Fink
Ana Hatherly
Thomas Müller
Marine Pagès
Kees Visser
et
John Wood
Paul Harrison
Davide Balula
Patrick Corillon
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Communiqué de presse
Issue de la science expérimentale du xixe siècle, l’expression « méthode graphique » désigne le développement de procédés de traduction et de quantification des mouvements de la matière et des organismes. Nulle autre innovation technique n’a fait vibrer la frontière entre science et esthétique de façon aussi intense et durable. « C’est l’impression d’assister à de la pure beauté en train de se faire, de se défaire, de se refaire incessamment sous nos yeux » écrit Georges Didi-Huberman à propos des photographies de fluides d’Etienne-Jules Marey, adepte de la mé- thode ; il ajoute, avec une certitude déconcertante : « inutile d’essayer d’y résister* ». Un siècle plus tard, dans le film American Beauty**, l’appropriation collective d’une esthétique touchée par le mouvement du réel est célébrée par la danse aérienne d’un sac en plastique filmée par un adolescent.
En tant que technique, la « méthode graphique » est directement issue de l’invention d’appa- reils de mesure de ce mouvement. Afin de mieux étudier les flux de la nature, le scientifique essaye de les quantifier. C’est ainsi que, sur un rouleau mobile de papier millimétré, s’inscri- vent, sous forme de lignes, les pulsations de la matière. Il est désormais possible de « transcrire sur papier ou sur une surface sensible, par des mécanismes souvent d’une grande ingéniosité, les pulsations, vibrations, ondulations, secousses, tressaillements, frémissements, produits par tous les mouvements de tous les corps vivants ou des objets mobiles*** » : ainsi surgissent les appareils enregistreurs tels que les cardiographes (pour le cœur), les anémomètres (pour le vent), les sphygmomètres (pour le pouls), etc. Des trajectoires précises peuvent en outre être dessinées grâce à la chronophotographie.
Ces techniques d’auscultation de la matière produisent des tracés d’une étrange beauté, direc- tement indexés à la vie. Leur intérêt scientifique s’étend et se développe jusqu’à aujourd’hui : des diagrammes de toutes sortes ont envahi l’imaginaire commun. La ligne tracée par la ma- chine ou par transposition peut être assimilée au trait du dessin artistique - elle y introduit, d’ailleurs, le geste de la main (assistée parfois par la machine), ses hésitations, ses recommen- cements, ses répétitions. Cet avènement d’une ligne sensible au détriment d’une ligne mimé- tique concerne la plupart des œuvres réunies dans l’exposition. D’autres mettent en exergue le caractère expérimental**** de l’enregistrement et de la mesure des phénomènes dans des fictions pleines d’humour.
Cette relation entre le phénomène et sa traduction linéaire détermine ainsi de nouveaux terri- toires de travail pour l’artiste. Le statut et la fonction du dessin comprennent désormais le dé- placement du corps et le mouvement de la matière, leur relation renouvelle ainsi la conception de l’espace et du temps. Ce processus, inauguré par les 3 Stoppages étalon de Marcel Duchamp, s’enracine dans une redéfinition du graphique dans l’art à travers ses outils, sa conception de la trace et sa pensée du mouvement. La représentation du corps et des phénomènes en général est à son tour aſſectée par cette vision. Le corps est interprété comme un cumul de mouve-
ments organiques et mentaux qui peuvent être exprimés tantôt par des diagrammes, tantôt par des sondages d’opinion. Le schéma mental ou simplement idiosyncratique fait son apparition lorsque l’œuvre graphique traduit un parcours imaginaire ou réel du corps, du regard ou de l’écriture de l’artiste. La représentation devient transposition sous forme de cartes, de découpes ou encore de démonstrations.
Dès le surgissement de cette rigueur mathématique appliquée aux phénomènes, une réaction artistique se fait sentir, celle d’une dérision fascinée, d’un détournement existentiel et poétique à la fois littéral et latéral. Les artistes réunis ici autour de ce champ thématique sont les héritiers obliques de telles pratiques scientifiques mais aussi de la tradition esthétique qui en prit acte. Les œuvres exposées reprennent le langage de la ligne, de la trace, de la transposition et de la traduction de la matière en mouvement. Le corps de l’artiste ou du spectateur se trouve placé au sein de l’expérience comme s’il était lui-même cet instrument traceur de lignes et étalon de mesure. Tout en s’en inspirant, l’observation de l’artiste est détournée de la précision graphique pour mesurer les conséquences du développement d’un langage diagrammatique. Une beauté abstraite s’en dégage - et une suggestion de l’abstraction comme trace -, ainsi qu’un comique propre à toute mécanique appliquée au corps.
Johana Carrier et Joana Neves, commissaires de l’exposition
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